Notre cabinet d’avocats, spécialisé en Droit du travail et en Droit international du travail, coté salarié, assiste régulièrement les salariés cadres qui souhaitent obtenir le règlement de leurs heures supplémentaires.
Comme évoqué dans l'actualité précédente, compte tenu de sa surcharge de travail, notre client avait effectué de très nombreuses heures supplémentaires.
Nous sollicitions le réglement des heures supplémentaires au titre des 3 dernières années.
Les questions sur la durée du travail, les heures supplémentaires effectuées, la contrepartie obligatoire en repos (les repos compensateurs), les calculs des heures travaillées, l’accomplissement et le paiement des heures supplémentaires se posent constamment.
"Ce sont les heures de travail accomplies par le salarié au-delà de la durée légale ou de la durée considérée comme équivalente."
La durée légale du travail est fixée à 35H00 par semaine.
Les heures supplémentaires se décomptent par semaine.
Le calcul s'effectue de façon hebdomadaire du lundi 00H00 pour se terminer le dimanche à 23H59.
Le salarié cadre décompte des heures travaillées et comptabilise les heures pendant lesquelles il se tient à disposition de l'employeur.
Le salarié cadre peut prétendre au règlement de ses heures supplémentaires et repos compensateur sous production d'un décompte détaillé.
Le salarié cadre est en droit d'obtenir une rémunération majorée de ses heures supplémentaires, en vertu de l'article 3121-36 du Code du travail :
25% pour les 8 premières heures supplémentaires de 35 à 43 heures
50% pour les heures supplémentaires au-delà de 43 heures.
Lorsque les heures supplémentaires donnent lieu à un repos compensateur, l'employeur est tenu d'appliquer les majorations.
La position de la Cour de cassation, en matière d’heures supplémentaires s’est considérablement assouplie en matière de preuve depuis son arrêt du 18 mars 2020 (n°18-10,919).
Il suffit aujourd’hui qu’un salarié présente des éléments au soutien de sa demande visant à obtenir le règlement de ses heures supplémentaires impayées.
Enfin la Cour de cassation a également rendu une décision sur le préjudice automatique, lorsqu’un salarié travaille plus de 48 heures par semaine qui constitue la durée maximale de travail (arrêt du 26 janvier 2022 (n° 20-21.636)).
Le salarié sollicite le paiement de la somme de 30.576,82 euros au titre des heures supplémentaires qu’il prétend avoir réalisées outre 3.057,68 euros pour les congés payés afférents « sur le fondement des articles L. 3121-22, L. 3121-36, L. 3171-4 du code du travail et 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, interprétés à la lumière la jurisprudence de la CJUE ».
Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2 alinéa 1er , L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
Au soutien de sa demande, le salarié cadre verse aux débats les pièces suivantes :
Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre utilement, contrairement à ce que soutient la société, dès lors que le décompte précise le volume horaire de travail journalier, qui est, au moins en partie, étayé par les courriels produits.
La société rappelle que seules les heures supplémentaires effectuées à la demande de l’employeur ouvrent droit à rémunération et fait valoir qu’elle n’a jamais demandé au salarié cadre de travailler au-delà de la durée légale hebdomadaire, l’invitant d’ailleurs expressément à arrêter de travailler le soir dans un courriel du 15 décembre 2015 ; elle soutient que le tableau invoqué par le salarié a manifestement été établi a posteriori pour les seuls besoins de la cause.
Elle ajoute que le tableau qu’elle produit en pièce 29 dans lequel l’analyse des 376 courriels produits par le salarié démontre d’une part que 232 sont des réponses à des invitations Outlook, des transferts de courriels ou des emails spontanés du salarié, sans aucune demande spécifique de l’employeur, d’autre part, que sur les 144 mails de réponse à des demandes de la société, seuls 24 ont été adressés après 19 heures, mais sans que cela ne lui soit demandé.
Les bulletins de paie font référence à un horaire mensuel de 151,67 heures.
Aucune des parties, et notamment pas l’employeur, n’a jugé utile de préciser quels étaient les horaires de travail 'habituels’ du salarié.
Du propre aveu de la société, celle-ci avait conscience des difficultés du salarié dans la gestion de son temps de travail, puisqu’il lui avait été proposé, à une date non précisée, de suivre une formation 'gérer son temps de travail pour gagner en efficacité et productivité', son supérieur rappelant cette proposition dans son courrier du 16 décembre 2015, adressant au salarié sa nouvelle fiche de poste.
Or, si l’on se réfère aux courriels postérieurs au 7 juillet 2014 et ce, dans la limite de la période sur laquelle porte la demande de rappel de salaires, nombre des mails produits étaient envoyés à des heures indues par le salarié, notamment à ses supérieurs hiérarchiques, M. [V], responsable financier, et M. [K], directeur de la gouvernance contractuelle.
Ce dernier, qui ne pouvait qu’avoir conscience du dépassement des horaires de travail 'normaux’ de son subordonné, peu important que ce soit ou non à sa demande, ne lui a jamais signifié un refus et 'les alertes’ invoquées par la société se résument à un courriel qui n’a été adressé que le 15 décembre 2015 par M. [K] où il répond à 21h28 à un mail que lui envoie le salarié à 20h55 et lui demande : 'PS : tu me diras demain pourquoi tu étais encore au bureau à près de 21h car je ne vois pas ce qui le justifie'.
L’autre pièce invoquée par la société, à savoir l’engagement pris en mars 2011, du salarié de solder dans l’année ses droits à congés et RTT (pièce 24 société) est à cet égard dépourvue de pertinence.
Le salarié explique que les heures supplémentaires réalisées se justifiaient au regard de sa charge de travail.
La société conteste l’existence de cette surcharge de travail mais s’abstient cependant de produire tout élément qui permettrait à la cour de s’assurer que les missions incombant au salarié pouvaient être accomplies sans dépassement de son temps de travail ainsi que toute pièce de nature à remettre en cause le temps de travail invoqué par le salarié et le nombre d’heures supplémentaires qu’il soutient avoir réalisées.
Or, et à titre d’exemples, la cour relève que :
Le vendredi 25 juillet 2014, à 7h18, M. [K] sollicite des explications sur des points comptables au salarié ; la réponse donnée à 19H10 témoigne du caractère très technique des informations fournies ayant nécessité des investigations, dont il n’est pas établi qu’elles pouvaient s’inscrire dans la journée, en plus de la charge habituelle de travail de l’intéressé et alors qu’elles étaient nécessaires en vue d’une réunion prévue le mardi suivant avec un organisme extérieur (SECAFI) ;
Le 4 novembre 2014, M. [K] demande au salarié de lui adresser une facture à 18h20, le salarié lui répondant à 20h36 ;
Le 12 novembre 2014, à 19h42, le salarié indique à son interlocuteur que son planning de la journée ne lui a pas permis d’échanger avec lui ; M. [V] est en copie de ce mail ; le salarié adressera un message du même ordre le 29 mai 2015 à 19h45 ;
Le 27 novembre 2014, à 19h53, M. [V] demande au salarié s’il a eu le temps de rechercher la liste des impacts fiscaux ; le salarié transfère ce document à 20h56,
M. [K] étant en copie de la réponse ;
Le 20 janvier 2015 à 19h56, M. [V] demande au salarié de confirmer la référence d’une facture, le salarié lui répondant à 21h17 ;
Le jeudi 9 avril 2015, à 21h06, le salarié indique à son interlocuteur qu’une demande d’une extrême urgence ne lui a pas permis de lui adresser les documents nécessaires le jour même et que ce ne sera pas non plus possible le lendemain, la journée étant déjà très chargée ; M. [V] est en copie de ce message ;
Le 15 avril 2015, M. le salarié sollicite une demande de renfort ;
Le 26 mai 2015, à 17h19, M. [K] demande des précisions sur des factures et le salarié lui répond à 20h02 ;
Le 28 octobre 2015, à 20h31, le salarié, informé à 20h29, de l’absence du comptable Fournisseurs de son service retransmet l’information à son supérieur, M. [V] ;
Le 5 novembre 2015 à 19h42, M. [K] demande une information avant de valider une avance sur frais d’un salarié pour des déplacements durant le mois, demande à laquelle le salarié répond quelques minutes plus tard ;
Le vendredi 6 novembre 2015, à 21h18, le salarié répond à une demande urgente du comptable Fournisseurs de son service qui est en arrêt de travail pour maladie depuis plus de 5 mois et souhaite prendre ses congés à compter du lundi qui suit ; M. [K] est en copie de ce message ;
Le 22 décembre 2015 à 17h19, M. [K] sollicite du salarié pour une date prévisionnelle en vue d’une mise à jour ; le salarié lui répond à 19h21 ;
Le 11 janvier 2016, le salarié répond à 19h06 à une demande formée par un prestataire extérieur à 18h59 : M. [V] est en copie de cet échange.
Au vu de l’ensemble des mails échangés, il ne peut qu’être retenu que la société était régulièrement informée des dépassements des horaires de travail, qu’elle a implicitement acceptés voire provoqués en lui adressant des demandes tardives et la cour a la conviction que le salarié a bien effectué les heures supplémentaires retenues dans son tableau.
La société sera en conséquence condamnée à lui payer les sommes suivantes :
Du 7 juillet 2014 au 21 décembre 2014 : 7.494,92 euros bruts outre 749,49 euros bruts pour les congés payés afférents correspondant à 121,75 heures majorées de 25% et 48,5 heures majorées de 50%,
Année 2015 : 21.573,30 euros bruts outre 2.157,33 euros bruts pour les congés payés afférents correspondant à 307,25 heures majorées de 25% et 172 heures majorées de 50% ;
Du 4 au 17 janvier 2016 : 1.508,60 euros bruts outre 150,86 euros bruts pour les congés payés afférents correspondant à 16 heures majorées de 25% et 16,50 heures majorées de 50%.
Au regard des dispositions de l’article 566 du code de procédure civile, la demande de dommages et intérêts présentée par le salarié, pour violation de règles relatives à la durée maximale de travail et au droit au repos, en lien avec celle qu’il formulait en première instance au titre des heures supplémentaires réalisées comme en étant le complément nécessaire, est recevable.
L’examen du tableau que produit le salarié démontre que la durée maximale journalière de travail a été très régulièrement dépassée ainsi qu’il le soutient.
En considération des pièces produites, la société sera condamnée à lui payer la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts à ce titre.
Annule la mise à pied notifiée au salarié par la société Keolis [Localité 3] Métropole le 4 février 2016,
La Cour d'appel de BORDEAUX condamne la société Keolis Métropole à payer au salarié les sommes suivantes :
Rappelle que les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, la capitalisation des intérêts étant ordonnée conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil,
Ordonne le remboursement par la société Kéolis Métropole à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées au salarié depuis son licenciement dans la limite de 6 mois d’indemnités.
Vous êtes salarié, vous avez été licencié pour inaptitude, motif économique, faute grave ou insuffisance professionnelle, n’hésitez pas à contacter notre cabinet d’avocats pour plus d’informations.
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