Notre cabinet d’avocats, spécialisé en Droit du travail intervient régulièrement au soutien des salarié licenciés de façon abusive.
Notre client a été embauché en tant que mécanicien en décembre 1999.
En 2014, lors de l’ouverture d'un nouvel établissement, le contrat de travail du salarié a été transféré.
Le salarié est devenu chef d’atelier, échelon 12, pour un salaire mensuel de 2 485,26 €.
Le 10 décembre 2019 a lieu un vif échange entre le salarié et l’employeur en présence d'un autre salarié. Le 11 décembre 2019, le salarié est placé en arrêt de travail.
Le 16 décembre 2019, le salarié envoie un mail à la Médecine du Travail.
Le 16 janvier 2020, il est reçu par le Médecin du Travail qui stipule sur son avis qu'il « Ne peut pas occuper son poste de travail actuellement ».
Cet avis est transmis à l’employeur avec une demande pour une étude de poste et de conditions de travail.
Le 18 janvier 2020, celles-ci sont effectuées par le Médecin du travail.
Le 24 février 2020, lors de la visite de reprise du salarié, le Médecin du Travail constate que celui-ci «ne peut pas occuper son poste actuellement ».
Cette attestation de suivi est envoyée à l’employeur.
Le 28 février 2020, le salarié est convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motifs personnels disciplinaires.
Le 2 mars 2020, le médecin du travail déclare le salarié « inapte au poste de chef d’atelier et à tout autre poste sur le site de son entreprise ».
Le 6 mars 2020, le salarié est convoqué à un entretien préalable à un licenciement pour inaptitude à son poste de travail, prévu le 16 mars 2020.
Le 19 mars 2020, l'employeur notifie, dans une même lettre, un licenciement pour faute grave et un licenciement pour inaptitude médicalement constaté.
Notre client saisira le Conseil de Prud’hommes de Pau, le 21 janvier 2021.
Le salarié demande au Conseil de prud’hommes, à titre principal, de prononcer la nullité de son licenciement au motif que celui-ci doit être reconnu comme frauduleux et ainsi d'ordonner la réintégration de droit et le paiement de l'indemnité d’éviction qui en découle ou à tout le moins de condamner l’employeur au paiement de dommages et intérêts pour licenciement nul sur le fondement de l’article L. 1235-3-1 du Code du travail.
À défaut, à titre subsidiaire, le salarié entend voire qualifier son licenciement pour faute grave en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ainsi voir condamner l'employeur à payer des dommages et intérêts pour un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Pour ce faire, il demande au Conseil d'apprécier le préjudice in concreto et d'écarter le barème de l'article L. 1235-3 du Code du travail, ainsi qu'au paiement du préavis et de l'indemnité légale de licenciement.
De plus, il entend voir condamner son employeur au paiement de dommage et intérêt en réparation du préjudice moral subi en violation de l’obligation de protection de santé.
Le Conseil de prud’hommes a donné raison au salarié et a prononcé la nullité du licenciement.
Conformément aux dispositions légales, dès lors qu'un salarié a été déclaré inapte par le Médecin du travail, l’employeur est tenu de se conformer à la procédure de licenciement pour inaptitude afférente et de procéder, le cas échéant, au licenciement du salarié pour ce motif.
Selon les articles :
Article L.4624-4 du Code du travail « Après avoir procédé ou fait procéder par un membre de l'équipe pluridisciplinaire à une étude de poste et après avoir échangé avec le salarié et l'employeur, le médecin du travail qui constate qu'aucune mesure d’aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé du travailleur justifie un changement de poste déclare le travailleur inapte à son poste de travail. L'avis d 'inaptitude rendu par le médecin du travail est éclairé par des conclusions écrites, assorties d’indications relatives au reclassement du travailleur ».
Article R.4624-42 du Code du travail « Le médecin du travail ne peut constater l’inaptitude médicale du travailleur à son poste de travail que :
- S’il a réalisé au moins un examen médical de l’intéressé, accompagné, le cas échéant, des examens complémentaires, permettant un échange sur les mesures d’aménagement, d’adaptation ou de mutation de poste ou la nécessité de proposer un changement de poste,
- S’il a réalisé ou fait réaliser une étude de poste ;S'il a réalisé ou fait réaliser une étude des conditions de travail dans l’établissement et indiquer et indiquer la date à laquelle la fiche d’entreprise a été actualisée,
- S'il a procédé à un échange par tout moyen, avec l’employeur …
- S'il estime un second examen nécessaire pour rassembler les éléments permettant de motiver sa décision, le médecin réalise ce second dans un délai qui n 'excède pas quinze jours après le premier examen,
- La notification de l 'avis médical d 'inaptitude intervient au plus tard à cette date (...} ».
De plus, la Cour de Cassation rappelle que « les règles d’ordre public relatives au licenciement du salarié inapte non reclassé s'appliquent, ce qui exclut que le salarié déclaré inapte puisse faire ['objet d'un licenciement pour faute grave postérieurement à l’avis d’inaptitude ». (Cass Soc 20 décembre 2017).
En l'espèce, le salarié a effectué une visite sur son initiative auprès du médecin du travail le 16 janvier 2020 où celui-ci stipulait que le salarié « ne peut pas occuper son poste actuellement ... / .... Rendez-vous à prendre avec l’employeur auprès de notre secrétariat ».
Le médecin de travail a réalisé une étude de poste et une étude des conditions de travail ainsi qu'un échange avec l’employeur, le 28 janvier 2020.
Alors que le salarié est en arrêt de travail jusqu'au 1er mars 2020, il est revu par le médecin du travail pour une visite de reprise le 24 février 2020.
Lors de cette visite, le médecin du travail stipule que le salarié « ne peut pas occuper son poste actuellement ... ».
Finalement, le 2 mars 2020, le salarié sera, lors de sa seconde visite, déclaré « inapte au poste de chef d’atelier et à tout autre poste sur le site de son entreprise ».
Le salarié reçoit la lettre de convocation à son entretien préalable en vue d’un licenciement pour motifs personnels disciplinaires le 2 mars 2020 c'est-à-dire le même jour où le médecin du travail le déclare inapte.
L'employeur, dès le lendemain, soit le 3 mars 2020, écrit aux services de la médecine du travail pour indiquer que le salarié ne peut être reclassé.
Le Conseil de prud’hommes relève, selon le principe « fraus omnia corrumpit », en application de la jurisprudence, que l’employeur ne pouvait pas engager une procédure de licenciement pour motifs disciplinaires et ainsi échapper aux règles d'ordre public découlant de la reconnaissance de l’inaptitude d'un salarié ne pouvant être reclassé.
En conséquence, le Conseil de prud’hommes prononce la nullité du licenciement du salarié.
Tout salarié dont le licenciement est nul a le droit, en principe, de réclamer sa réintégration dans son emploi ou, à défaut, dans un emploi équivalent, (art L.1235-3-1 du Code du Travail ; art L 1235-11 du Code du Travail ; Cass.soc. 30 avril 2003)
La réintégration du salarié dans l'entreprise s'accompagne de l'allocation d'une indemnité d'éviction qui répare le préjudice subi par le salarié en raison de la perte de son salaire.
En conséquence, le Conseil ordonne la réintégration de droit du salarié et condamne l’employeur au paiement de l’indemnité d’éviction correspondant aux salaires que le salarié aurait perçus pour la période du 19 mars 2020 à la mise à disposition du jugement c'est-à-dire le 13 avril 2022 soit un montant de 61.862,70 € bruts ainsi qu'au paiement des congés payés y afférents pour un montant de 6.186,27 € bruts.
Le Conseil de prud’hommes a également alloué 2.000 € en application de l’article 700 au salarié.
Vous êtes salarié, vous avez été licencié pour inaptitude, faute grave, insuffisance professionnelle ou pour motif économique, n'hésitez pas à contacter notre cabinet d'avocats pour plus d’information.